Le top 10 de juillet 2018

Don’t Worry, He Won’t Get Far on Foot de Gus Van Sant avec Joaquin Phoenix et Jonah Hill.

Mois de l’année qui rime avec vacances, juillet sera forcément marqué par les suites hollywoodiennes de films à succès. Mais même s’il s’agit d’une période axée fortement sur le cinéma populaire, la diversité sera au rendez-vous. Voici les dix titres à surveiller au fil des quatre prochaines semaines.

Don’t Worry, He Won’t Get Far on Foot (Pas de panique, il n’ira pas loin à pied)  : Joaquin Phoenix (aux côtés de Jack Black, Jonah Hill et Rooney Mara) interprète un alcoolique qui, après un grave accident, est confiné à un fauteuil roulant. Il entame finalement une cure qui le mènera à se passionner avec talent pour le dessin satirique. Histoire véridique, distribution haut de gamme, personnages colorés, le nouveau Gus Van Sant a tout pour séduire.

Le Retour du héros : Un peu comme George Clooney, Jean Dujardin, on l’aime! Dans les comédies, il est toujours à son aise, charmeur et bouffon à la fois. Ici, il endosse l’uniforme d’un don Juan fumiste sévissant à l’époque napoléonienne. Mélanie Laurent lui donne la réplique avec bonheur, prenant plaisir à tenter de remettre à sa place le personnage de fieffé menteur joué par l’acteur. Une comédie estivale amusante et sans prétention.

Ant-Man and the Wasp (Ant-Man et la Guêpe) : Cette suite donne l’occasion au micro-super-héros de s’adjoindre les services d’une compagne pour combattre le crime, découvrant du même coup qu’il peut aussi devenir Giant-Man. Effets spéciaux « nano et macro » au menu. Paul Rudd et Evangeline Lilly endossent les costumes en latex d’insectes héroïques.

Ciao Ciao : Ce drame chinois aux images bucoliques somptueuses met en scène une jeune femme qui retourne dans sa campagne natale pour rendre visite à ses parents. Sur place, elle deviendra l’objet de tous les désirs du fils du contrebandier local. Un film aussi éthéré qu’exotique .

1991 de Ricardo Trogi

1991 : Seule sortie québécoise du mois, ce toisième volet portant sur les souvenirs de jeunesse du réalisateur Ricardo Trogi nous emmène en Italie là où, à travers de fort beaux paysages, la malchance du jeune héros vient bouleverser un voyage destiné au départ à la romance d’une vie.

– En position six, sept et huit, allons-y à égalité pour un « trio combo » de films pour enfants, Teen Titans Go! The Movie, Hotel Transylvania 3: Summer Vacation et Raf, ma girafe. Les sorties familiales sont un point fort du cinéma estival. Ainsi, ces trois longs métrages devraient ainsi convenir aux parents cherchant des activités pour leurs jeunes lorsque la pluie se met de la partie. On aurait pu y ajouter en dessert Skyscraper avec Dwayne « The Rock » Johnson tellement son bassin de fans est en bas âge.

Salyut 7 : Non, malgré son titre, il ne s’agit pas de la suite de Salyut 6, mais bien d’un film historique russe, qui s’attarde au sauvetage d’une station spatiale orbitale par deux cosmonautes soviétiques. Cette curiosité filmique a très bonne réputation et devrait séduire tous les amateurs de la conquête spatiale.

Mission: Impossible – Fallout (Mission«: impossible – Répercussions) : Des suites en juillet, il y en aura. On pense à The Equalizer 2, Mamma Mia! 2 et surtout à Mission: impossible, sixième volet toujours avec Tom Cruise aux commandes dans le rôle de l’agent secret Ethan Hunt. Rendons à César ce qui appartient à César, tous les films de la série sont enlevants et divertissants. Du cinéma pop-corn à son meilleur.

Le soutien au support ?

Récemment, Robin Aubert a écrit un texte accessible à tous sur sa page Facebook qui revenait sur la belle victoire des Affamés au plus récent Gala Québec Cinéma (huit prix Iris gagnés au total dont celui du meilleur film) et aussi, en parallèle, sur l’absence de copie DVD/Blu-ray de son film au pays. Le distributeur, Les Films Séville (et Les Films Christal), n’avait pas jugé bon de sortir sur ces supports le long métrage, jugeant que les résultats moyens des Affamés en salle (20 000 spectateurs au total) ne justifiaient pas l’investissement. Depuis la sortie du réalisateur, un revirement de situation est survenu. Grâce à l’aide de Renaud-Bray et d’Archambault, la production sortira finalement en version physique dans notre province le 31 juillet prochain. Mais l’histoire ne s’arrête pas là ou du moins, elle a de quoi faire réfléchir.

Robin Aubert et Marc-André Grondin lors du tournage des Affamés.

Tout d’abord, soulignons qu’après son passage en salle dans les grands centres au Québec, Les Affamés a vu ses droits de distribution à l’international rachetés par Netflix au début de 2018. Le film se retrouve donc sur cette plateforme depuis le mois de mars, et ce, dans plusieurs pays, ce qui lui donne une fort belle visibilité à l’échelle mondiale surtout pour un long métrage de cinéma de genre. Au pays, la diffusion canadienne était déjà conclue et rattachée à certains gros joueurs locaux. On pouvait donc depuis peu le voir sur Itunes ou Illico. C’est en 2019 que Netflix récupèrera les droits pour le territoire canadien et pourra l’offrir à ses abonnés locaux. En marge de ces négociations, on apprenait aussi qu’un distributeur espagnol avait acheté les droits des Affamés pour le territoire hispanique, décidant du même coup de l’offrir en DVD/Blu-ray à la fin du mois d’avril.  Les Espagnols seraient-ils plus amateurs d’histoires de zombies que les Québécois ou encore davantage collectionneurs de films?

Financé principalement par Téléfilm Canada et la SODEC, Les Affamés a profité d’un budget (moyen pour un film québécois) de 3,7 millions. L’absence d’une sortie en DVD/Blu-ray était somme toute étonnante puisqu’un tel financement à la production devrait logiquement inclure une diffusion large et multiple (en vidéo sur demande et en format physique) une fois la vie du film en salle terminée. Mais en 2018, pour rentabiliser une production de DVD/Blu-ray, encore faut-il en vendre un minimum de copies. Depuis quelques années, les ventes sont en chute libre et les clubs vidéo se font rares. Il reste le marché des collectionneurs, quelques clubs vidéo qui font presque office de musées du cinéma et évidemment le réseau des bibliothèques scolaires et municipales. La tendance aux copies virtuelles, à la location en vidéo sur demande et au visionnement en ligne semble irréversible et inévitablement moins coûteuse pour un distributeur québécois.

On ne sait trop ce que l’avenir nous réserve tellement la technologie et les coutumes de consommation du cinéma et de la musique changent rapidement depuis dix ans. Cela dit, le pire serait de croire que tout ce phénomène est sans conséquence. Que l’on finance un long métrage au Québec pour 3, 4 ou 5 millions de dollars et que ce film, après sa sortie en salle, puisse disparaître sans laisser de trace a de quoi nous alarmer. Si Illico ou Super Écran ne s’y intéressent pas, ce n’est pas Netflix qui va sentir le besoin de voler au secours de petites productions québécoises en manque de visibilité et de plateformes. La plus grande des erreurs pour les milliers d’abonnés de Netflix est présentement de croire qu’ils ont accès à tout le cinéma du monde occidental. Le « catalogue Netflix » est au cinéma ce que les étalages de livres chez Costco sont à la littérature mondiale. Il se distribue au Québec près de 400 films annuellement dans nos salles : des œuvres du Québec (environ 60), des États-Unis (environ 250) et le reste provenant du reste de la planète, surtout de l’Europe. Combien de ces films peut-on voir sur Netflix une fois leur vie en salle terminée? Très peu!

Les questions fusent présentement et concernent autant les producteurs que les distributeurs, les diffuseurs et les subventionneurs. Le devoir d’offrir une sorte de pérennité aux longs métrages québécois, une accessibilité pour le public d’ici de voir ce qui se fait en cinéma québécois est primordial. Produire des dizaines de longs étages québécois, oui, bien sûr, mais les distribuer et les diffuser au plus grand nombre, les rendre accessibles, c’est capital. Le dossier est à suivre, et ce, peu importe le support.

Les sculptures apocalyptiques des Affamés.

 

Les dix films de juin 2018

Le drame d’horreur Heridatary

Avec un léger retard, voici les dix films à voir en  juin, et ce, en soulignant les nombreuses sorties de films québécois : Napoléon en apparte (tourné à Québec), La Chute de Sparte, Identités, L’Amour se creuse un trou.

Hereditary (Héréditaire) : Ce film d’horreur, dont la belle réputation ne cesse de grandir, présente des phénomènes paranormaux perturbant le quotidien d’une famille qui vient d’emménager dans la résidence de l’aïeule.

Normandie nue : Le toujours solide François Cluzet interprète un maire de village solidaire de ses agriculteurs dans cette comédie rurale sans prétention signée Philippe Le Guay.

Les Incroyable 2 (Incredibles 2) : On attendait avec impatience cette suite autour d’une famille dont tous les membres sont dotés de super-pouvoirs. Le premier est un classique de Pixar.

Anote’s Ark (L’Arche d’Anote) : Le photographe Matthieu Rytz a réalisé un documentaire étonnant sur un archipel du Pacifique menacé par la montée des eaux. À voir.

Ocean’s 8 (Debbie Ocean 8) : Un Ocean 11 à la sauce féminine. Une distribution éclatante avec Sandra Bullock, Anne Hathaway, Cate Blanchett et autres. On devrait être diverti par cette comédie centrée sur l’organisation entourant le vol d’un collier de diamants.

La Chute de l’empire américain : Que dire sinon que Denys Arcand est vraiment dû pour un film plus mémorable que Le Règne de la beauté. Grosse distribution pour cette comédie dramatique au cynisme assumé.

Jurassic World : Fallen Kingdom (Le Monde jurassique : le royaume déchu) : Le film bonbon de juin avec des effets spéciaux à la tonne.

Un beau soleil intérieur : Claire Denis est l’une des plus intéressantes réalisatrices de l’Hexagone. Dans ce long métrage, elle dirige Juliette Binoche qui interprète avec émotion une femme dont la vie amoureuse est bancale à souhait. Le chanteur Philippe Katerine y joue un petit rôle fort amusant.

Ôtez-moi d’un doute : François Damiens se révèle très touchant dans cette comédie dramatique où il incarne un homme qui découvre qu’il a un deuxième père. Sa quête l’amènera, sans qu’il s’en doute, à tomber amoureux de la fille de son véritable géniteur.

Sicario : Day of the Soldano (Sicario : le jour du soldat) : Stefano Colima prend la relève de Denis Villeneuve à la réalisation de cette suite qui, avec Josh Brolin et Benicia Del Toro, explore une fois de plus l’univers violent du trafic de drogues entre le Mexique et les États-Unis.

L’arche de Matthieu Rytz

Après un Mois du documentaire à la programmation fort relevée et qui se déroulait tout le mois de mai, voilà que juin s’entame avec la sortie de trois nouveaux documentaires au Clap, soit Metamorphosis, RBG et L’Arche d’Anote. Ce dernier, réalisé par Matthieu Rytz, s’attarde à la catastrophe anticipée qui menace un archipel entier situé en Micronésie et dont la survie ne tient qu’à un fil face à la montée des eaux du Pacifique. Joint au téléphone alors qu’il était à San Francisco, le réalisateur du film donne des détails sur Anote’s Ark, un documentaire aux images somptueuses et au propos alarmant.

Édition Le Clap : Matthieu, vous demeurez à Montréal depuis longtemps?

Matthieu Rytz, réalisateur et photographe

Matthieu Rytz : Je suis natif de Suisse et je suis arrivé à Montréal voilà plus de quinze ans. Depuis, j’ai gravité dans le milieu du storytelling, tout ce qui touche aux façons de raconter des histoires par l’image, en photo ou autres, peu importe. Je me suis aussi beaucoup occupé de l’organisation du World Press Photo à Montréal. J’ai un livre de photos également en préparation. Du même coup, j’ai travaillé durant quatre ans à la réalisation de L’Arche d’Anote.

ÉLC : Comment cette aventure a-t-elle commencé?

MR : J’ai rencontré le président des îles Kiribati, Anote Tong, et une jeune mère qui s’expatrie. Tous deux m’ont fasciné. L’histoire de cet archipel est passionnante du point de vue documentaire. Tourner là-bas n’a pas été chose facile. Heureusement, je me suis bien entouré, car ma spécialité, c’est avant tout la photographie. Mais un film, il faut aussi le préparer, le monter. Cela dit, mes études en anthropologie m’ont aidé à établir des contacts avec les gens sur place, à mieux cerner les enjeux de cette petite population.

ÉLC : Sur le terrain, avez-vous été surpris par l’ampleur de la situation?

MR : Au niveau concret de la montée des eaux, c’est un processus qui s’étale sur du long terme. Ce qui m’a fasciné, c’est plus subtil. Dans 50 ans, ce lieu n’existera plus. Ce qui est incroyable, c’est de constater qu’un peuple est sur le point d’être déraciné. Ils vont perdre leur terre natale. Ça, c’est une thématique très touchante pour moi. Ensuite, bien, tout ça se relie à l’actualité, aux changements climatiques qui frappent à différents endroits sur la planète.

ÉLC : Il y a une scène surréelle dans L’Arche d’Anote où une firme d’ingénierie japonaise nous montre la maquette d’une future ville sous-marine. Est-ce cela que nous réserve l’avenir à moyen terme?

MR : C’est fou et réaliste à la fois. C’est une des plus grosses compagnies d’ingénierie au monde qui travaille là-dessus, mais ce n’est pas pour tout de suite. Cela dit, déjà les îles flottantes sont en construction dans la baie de Tokyo et des nouvelles technologies sont  mises au point pour nous aider à nous adapter face aux changements climatiques et à tout ce que ça entraîne. Cette histoire de survie et d’adaptation dans sa globalité ne fait que commencer.

ÉLC : Et la vie du film une fois terminée, comment s’annonce-t-elle ?

MR : On a eu la chance de présenter le film à Sundance au début de l’année. L’accueil a été incroyable. Il n’y avait que douze documentaires sélectionnés cette année, dont notre long métrage. Donc, ça nous a donné une fort belle visibilité et là on continue de le présenter dans les festivals internationaux. J’arrive de Nouvelle-Zélande d’ailleurs. Le succès, relatif bien sûr pour un documentaire, est au rendez-vous et j’en suis très heureux.