J’ai abordé à quelques reprises sur ce blogue le mystère de la distribution de films au Québec. Le marché mondial vit de profonds changements depuis quelques années et tous les joueurs ont de la difficulté à s’adapter. La vente de films se fait encore par territoire, mais les Amazon et Netflix de ce monde tentent de modifier cette méthode de fonctionnement en voulant distribuer mondialement les titres ajoutés à leur catalogue.
Bref, certains films profitant de critiques favorables, d’un buzz de festival ou d’une distribution éclatante peinent parfois à prendre l’affiche au Québec. C’est le cas de Misconduct, premier long métrage de Shintaro Shimosawa, un thriller judiciaire mettant en vedette Al Pacino, Anthony Hopkins, Josh Duhamel, Malin Ackerman et Julia Stiles. Ce film américain, produit pour un modeste budget (selon les normes hollywoodiennes) de 11 millions, a pris l’affiche chez nos voisins du Sud en février dernier. En France, il sortira directement en DVD au mois d’août prochain sous le titre Manipulations.
Le 3 juin dernier, Misconduct a pris l’affiche au Royaume-Uni et le magazine Variety s’est penché sur ses premiers résultats désastreux au box-office britannique. Lors de sa première fin de semaine de diffusion en salle (du vendredi au dimanche), le long métrage a recueilli un « grand total » de 141 $. Pendant ce temps, à titre de comparaison, Warcraft, l’adaptation du jeu vidéo, a ramassé plus 5 millions sur le même territoire en étant présenté dans plus de 500 cinémas.
La comparaison peut paraître boiteuse évidemment. On ne parle pas ici du même budget de marketing, des mêmes attentes pour le box-office ni de la même distribution en salle, Misconduct n’étant diffusé que dans cinq cinémas. Mais il y a lieu de constater que le générique du film n’a eu aucun effet vendeur. Deux acteurs oscarisés, Pacino et Hopkins, n’ont pu éveiller la curiosité du public anglais. Aux États-Unis, ce ne fut guère mieux. Les critiques assassines n’aidant en rien la cause de Misconduct, c’est 24 000 $ au total qui furent amassés lors de sa courte carrière sur les écrans. La stratégie marketing misait pourtant sur l’attrait indéniable des stars qui composent la distribution du film, on parle au final d’un véritable bide filmique. Et au bout du compte, c’est Pacino et Hopkins qui mordent la poussière et font sans le vouloir la manchette, ayant participé à une œuvre qui sera reconnue comme l’une des moins rentables de l’histoire.
L’étrange anecdote dans tout ça, c’est que les Sud-Coréens, eux, étaient au rendez-vous, Misconduct frôlant le million de dollars en recette dans leur pays. Il y a le mystère de la distribution de films et il y a maintenant le mystère de la Corée du Sud. Avec humour, on pourra dire que la Corée du Nord n’est désormais plus seule à susciter les questionnements.