Après avoir coréalisé le film de fiction Lucidité passagère en 2009, Marie-Hélène Panisset est devenue mère, deux fois plutôt qu’une. Puis, elle a retrouvé le désir de tourner un film à nouveau. Sa rencontre avec Thi Be Nguyen, en 2014, allait lui permettre de réaliser cet objectif en « accouchant » d’Une nuit sans lune, boat people : 40 ans après, un documentaire qu’elle signe avec brio. Ce témoignage filmique relate l’arrivée au pays de milliers de Vietnamiens ayant fui le régime communiste de leur pays d’origine durant les années 70.
Marie-Hélène se souvient de sa rencontre avec Thi Be par l’entremise d’amis communs : « Elle voulait faire un film sur les boat people originaires du Vietnam qui, comme ses parents, avaient traversé l’océan pour venir trouver la paix en Amérique. Emballée par le sujet, la cinéaste s’est lancée dans l’aventure forte d’une équipe réduite au strict minimum et d’un équipement des plus légers : la réalisatrice derrière la caméra, des micros sans fil, Thi Be aux entrevues. « Notre film, au fil du tournage, est devenu très d’actualité », dira-t-elle, appuyant ses dires sur la crise des migrants syriens qui a fait les manchettes partout dans le monde. Une nuit sans lune est aussi né de la volonté des enfants des boat people de mieux comprendre ce qui s’est passé, de réaliser d’où ils viennent alors que leurs parents avaient fait une croix sur leur pays d’origine associé à de douloureux souvenirs. La réalisatrice précise avec fierté que son film fait le point sur cet exode forcé, et ce, de façon non objective grâce à plusieurs points de vue, comme un film choral, afin de mieux cerner toute l’histoire avec plusieurs témoignages, sans avoir besoin d’un narrateur qui nous prend par la main.
Le phénomène des boat people avait marqué les esprits à l’époque. On avait appris à découvrir cette culture vietnamienne, à favoriser l’intégration à la société québécoise de milliers d’exilés (près de 125 000 au total) fuyant un régime politique dictatorial et cruel. « Dénonçant le communisme totalitaire, les Vietnamiens qui arrivaient bénéficiaient d’une bonne presse à l’époque et la population s’était mobilisée en leur faveur », de se souvenir Marie-Hélène Panisset. Son documentaire tire son titre d’une scène émouvante où Thi Be relate les dires de son père, un homme toujours affecté par ces événements. Résumant leur évasion du camp de concentration à leur deuxième tentative de fuite, le père de Thi Be disait : « On a été plus intelligent la deuxième fois, on a fui une nuit sans lune ». Une phrase qui résume parfaitement ce drame humanitaire bouleversant.
La réalisatrice travaille actuellement sur un autre projet, une fiction ayant pour titre Le Poids de Mandel, tourné en format vertical. D’ici la concrétisation de cette nouvelle audacieuse réalisation, Une nuit sans lune sort en salle à Montréal et au Clap ce lundi 21 novembre. Une projection événement aura lieu au même endroit le mercredi suivant à 19 h, en présence de Marie-Hélène Panisset qui participera à une discussion avec le public.