L’émission Infoman à Radio-Canada a comme tradition annuelle de « récompenser » les pires films et performances du cinéma québécois. Jeudi prochain, le 26 avril, avec humour évidemment, un comité formé de cinq critiques (de Radio-Canada, de La Presse, de The Gazette et du Devoir) nous fera part de ses choix pour l’année 2017 dans le cadre d’un concept, les Prix Aurore, qui s’inspire grandement des Razzies américains.
Encore cette année, on constate dans les choix des critiques d’Infoman que c’est le cinéma populaire québécois qui est ciblé dans ce qu’il y a de plus mauvais au grand écran. Les nominations dans la catégorie Meilleur pire film de l’année sont De père en flic 2, Goon 2, Innocent et Le Trip à trois. Quatre comédies, aucun drame. Bon Cop Bad Cop 2 a sûrement évité de justesse le palmarès, on lui a préféré le Slap Shot des Canadiens anglais. Il faut justement s’interroger sur l’absence de drames parmi les nommés, et ce, même si l’idée de départ est d’interpeller les téléspectateurs avec des œuvres qu’ils connaissent un minimum, sachant qu’un paquet de longs métrages québécois (dont certains pas toujours réussis) passent sous le radar chaque année faute de budget marketing adéquat.
Mais le constat demeure, il y a un fossé énorme entre la perception qu’a le grand public de nos films et celle que le milieu du cinéma (producteurs, artisans et critiques) peut avoir. Nos drames sont vus comme des œuvres d’auteurs ternes à souhait et les films populaires comme des événements rassembleurs. Le 29 mai prochain, au Gala Québec Cinéma, les sept films finalistes qui batailleront pour le prix du Meilleur long métrage de fiction de 2017 sont des drames. On peut mettre Les Rois mongols dans la catégorie comédie dramatique à la limite, reste qu’aucune comédie n’a réussi à se glisser dans le lot. Avec raison peut-être, De père en flic 2, à titre d’exemple, n’est pas à la hauteur du premier et les réalisations de Robin Aubert et Robert Morin, elles, sont de fort calibre.
Mais au bout du compte, lors d’une sortie cinéma, le public québécois va encore systématiquement voir nos films d’humour plutôt que nos drames plébiscités par les médias pour leurs grandes qualités. Nos comédies sont presque toujours championnes au box-office. Et la situation ne risque pas de changer sauf si un effort est fait pour donner du tonus aux scénarios humoristiques qui franchissent l’étape du financement pour aller en production. Il faut aussi éviter de toujours tabler sur les suites et le vedettariat comme têtes d’affiche et miser sur l’audace, sur une histoire « punchée » et un récit original. Avec les succès qu’obtiendront en 2018 La Chute de l’empire américain, La Bolduc et 1991, le portrait changera légèrement l’an prochain. Mais il reste beaucoup de travail à faire afin d’équilibrer les genres, autant aux Aurores qu’au Gala Québec Cinéma.