Ken Scott a toujours voulu faire du cinéma, comme réalisateur principalement. Connu au départ dans le milieu de l’humour quand il a fait partie du groupe Les Bizarroïdes, aux côtés notamment de Martin Petit, le cinéaste et scénariste s’est servi de ce tremplin pour mieux apprendre à faire rire le public ce qui allait le mener à scénariser et à réaliser des comédies au grand écran. De passage à Québec pour la promotion de sa plus récente réalisation, L’Extraordinaire Voyage du Fakir, il a bien voulu nous donner des détails sur la conception de son film, mais aussi sur sa situation actuelle, lui qui a l’air à cheval entre le Québec, la France et les États-Unis.
Le Clap : Votre film est une coproduction, mais le Québec n’est pas impliqué dans ce projet?
Ken Scott : Effectivement non. C’est plutôt une coproduction entre la France, l’Inde et l’Italie. Au départ, j’étais le seul Canadien sur mon film, mais j’ai réussi à inviter l’actrice Sarah-Jeanne Labrosse à en faire partie.
LC : C’est l’adaptation d’un roman populaire de Romain Puértolas intitulé L’Extraordinaire Voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea. Vous n’avez pas voulu conserver le titre dans son intégralité?
KS : Ha! Ha! Non. Le pire, c’est que je souhaitais garder le même titre, car je le trouve drôle. Mais ça ne rentrait pas sur une affiche. Le livre a été un best seller en France et il a été vendu et distribué dans 35 pays dans le monde. Je suis tombé amoureux de cette histoire qui a du cœur, qui est drôle, absurde, fantaisiste. Le récit se penche sur un Indien, fasciné par Ikea et son catalogue et qui partira sur les traces de ses origines paternelles en Europe. Là-bas, son voyage initiatique le fera rencontrer toutes sortes de personnages dont beaucoup d’immigrants.
LC : Justement, le thème de l’immigration est franchement d’actualité présentement. Ça tombe bien avec la sortie de votre film.
KS : Tout à fait. En même temps, ce n’est pas un long métrage pamphlétaire sur le sujet mais, telle une fable, il apporte une réflexion. Le message du film, c’est de considérer l’immigrant simplement comme une autre version de nous-même. On mise sur l’empathie que génère l’histoire qui amène le personnage principal à vivre des situations rocambolesques dans plusieurs pays.
LC : Votre acteur principal, Dhanush, c’est une vedette du cinéma en Inde, non?
KS : Absolument, c’est une star là-bas. Il a beaucoup tourné chez lui. L’intérêt, en travaillant avec lui, c’était de l’opposer à des personnages joués par des acteurs qui venaient d’un peu partout dans le monde. Ici, on va reconnaître les Français Gérard Jugnot et Bénénice Bejo. Les autres sont moins connus. Moi, ça m’a aussi permis de rencontrer des gens de partout qui m’ont appris plein de choses sur leur culture, notamment sur l’Afrique. Ça a rendu le tournage vraiment enrichissant, humainement et artistiquement.
LC : Ça faisait longtemps qu’on n’avait pas eu de vos nouvelles, car vous étiez en Europe pour concocter ce film. Avant ça, vous avez fait un détour par les États-Unis pour y réaliser deux longs métrages. Mais Ken Scott, vous êtes où en fait?
KS : C’est vrai que mon parcours provoque une drôle d’impression. Ça fait neuf ans que je n’ai pas fait de films au Québec, depuis Starbuck, en fait. Ça a passé tellement vite toutes ces années, mais j’habite encore au Québec, je vous le confirme.
LC : Ce qui est aussi particulier dans votre carrière, c’est que vous êtes à l’origine de deux des plus grands succès du cinéma québécois, La Grande Séduction comme scénariste et justement Starbuck comme réalisateur, et en même temps, c’est facile de vous associer à des projets qui ont fait l’objet de remakes, car ça a été le cas pour ces deux titres.
KS : C’est vrai. Et les remakes, ce n’est pas toujours évident. Et pour La Grande Séduction et pour Starbuck, il y a eu trois remakes internationaux. J’ai d’ailleurs réalisé moi-même la version américaine de Starbuck (Delivery Man) et ce n’est pas plus facile comme concept, car il y a beaucoup de pièges. C’est la même histoire, mais la formule change. Et il y a une part d’alchimie dans la réalisation d’un film. Sinon, la recette du succès s’appliquerait avec facilité. Puis, le copier/coller, c’est dangereux, il ne faut pas tomber dans ce piège ou encore à l’inverse faire différent juste pour faire différent. Atteindre le juste milieu est tout un défi. C’est une drôle de sensation faire un remake, c’est comme mettre un costume de bain déjà mouillé. Ha! Ha!
L’Extraordinaire Voyage du fakir sort le 21 juin prochain, partout au Québec, mais aussi dans 160 pays à travers le monde.