Le 22 juillet prochain sortira en format DVD et Blu-ray ainsi qu’en VSD le tout nouveau long métrage du réalisateur Terry Gilliam, The Zero Theorem. Ce choix de sortie veut automatiquement dire que son film ne sera pas projeté en salle au Québec, une chose étonnante compte tenu de la réputation de l’artiste, de la brochette de vedettes au générique de The Zero Theorem et du sujet potentiellement vendeur au cœur de ce douzième long métrage du Britannique d’adoption, reconnu pour son travail au sein des Monty Python.
La distribution des films, je l’ai déjà souligné sur ce blogue, est un phénomène difficile à comprendre. Ce volet essentiel relié aux sorties de films à l’international comporte plusieurs mystères et problématiques. Pourquoi une œuvre sort-elle en salle et une autre uniquement sur les tablettes des clubs vidéo ou en Vidéo sur demande? Les clauses, nombreuses, et les droits parfois onéreux pour l’acquisition d’un titre en particulier apportent leur lot d’embûches pour le distributeur local et le forcent souvent à revoir sa stratégie de mise en marché et d’exploitation d’un film étranger que ce soit pour la date de sortie ou le support envisagé.
Hormis les aspects administratifs, financiers et de protection de territoire, celui de l’attrait de l’œuvre sur le grand public est à considérer fortement lorsqu’on doit mettre en marché un long métrage. À une époque, il était normal qu’un film mettant en vedette Gérard Depardieu ou Daniel Auteuil, se retrouve au grand écran au Québec. Systématiquement, un film signé par Brian De Palma ou Francis Ford Coppola était distribué en salle à Montréal et Québec. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas, la donne a changé comme nous le démontre l’arrivée directement en DVD de longs métrages signés par ces cinéastes de renom ou ayant à leur générique des acteurs connus du grand public mais qui, pour de multiples raisons, n’auront aucune diffusion en salle au Québec. C’est le cas pour le plus récent film de Gilliam, mais aussi pour celui de l’Italien Giuseppe Tornatore, le cinéaste derrière Cinéma Paradiso, dont le long métrage The Best Offer avec Geoffrey Rush vient tout juste de sortir ici directement en DVD.
Revenons au cas de Gilliam: il est étonnant de constater que Metropole Films, le distributeur au Québec, n’a pas voulu tabler sur l’aura du réalisateur et sur la beauté futuriste et surréaliste de cette œuvre suscitant la curiosité et ayant à son générique Matt Damon, Christoph Waltz, Tilda Swinton, Ben Whishaw, Peter Stormare, David Thewlis, Mélanie Thierry et le jeune Lucas Hedges. L’histoire fabuleuse de The Zero Theorem est quant à elle résumée de cette façon par la production… Dans un avenir proche, à Londres, les avancées technologiques ont placé le monde sous la surveillance d’une autorité invisible et toute-puissante : Management (Damon). Qohen Leth (Waltz), génie de l’informatique, vit en reclus dans une chapelle abandonnée où il attend désespérément l’appel téléphonique qui lui apportera les réponses à toutes les questions qu’il se pose. Management le fait travailler sur un projet secret visant à décrypter le but de l’Existence. La solitude de Qohen est interrompue par les visites des émissaires de Management : Bob (Hedges), le fils prodige de Management et Bainsley (Thierry), une jeune femme mystérieuse qui tente de le séduire. Malgré toute sa science, ce n’est que lorsqu’il aura éprouvé la force du sentiment amoureux que Qohen pourra enfin comprendre le sens de la vie…
Comment expliquer l’absence au grand écran d’une oeuvre aussi inspirante, si ce n’est que par les échecs réguliers des dernières réalisations de Terry Gilliam (The Brothers Grimm, Tideland, The Imaginarium of Doctor Parnassus) et par l’accueil plutôt tiède réservé à The Zero Theorem lors de sa présentation à la Mostra de Venise, en 2013. Hélas, et c’est ce qui attriste les nombreux fans du réalisateur maintenant âgé de 73 ans, ce manque de confiance envers sa plus récente œuvre dénote un manque de plus en plus cruel d’audace des distributeurs, un rejet d’une vision artistique forte qui nous a donné des films aussi marquants que Brazil, Time Bandits et 12 Monkeys. La situation sera-t-elle appelée à changer pour le mieux ces prochaines années? Difficile à prédire. Alors d’ici la sortie en catimini le 22 juillet de The Zero Theorem, c’est avec sa bande-annonce que nous serons appelés à rêver d’un cinéma plus audacieux à prendre place sur nos grands écrans, un cinéma à l’image de la vision fertile et délirante d’un artiste hors norme, Terry Gilliam.