Porté par des critiques dithyrambiques, Portrait de la jeune fille en feu, réalisé par Céline Sciamma, est l’un des films phares du cinéma français de 2019 avec Les Misérables de Ladj Ly et leccontroversé J’accuse de Roman Polanski. La réalisatrice, déjà adoubée pour avoir signé Naissance des pieuvres, Tomboy et Bande de filles, a choisi Adèle Haenel (son ex-compagne) et Noémie Merlant pour incarner les rôles principaux de son film qui repose entièrement sur leurs épaules. L’histoire se résume ainsi… En 1770, Marianne, une peintre est chargée de faire le portrait de Louise et de s’assurer de sa fidélité envers son futur époux à qui elle est destinée. Entre elles, la méfiance de la rencontre initiale fera place à une passion inavouable.
Rencontre avec l’une des deux actrices principales, Noémie Merlant, 32 ans, présente dans presque tous les plans du film et dont la carrière a vraiment décollé en 2019.
Le Clap : En 2019, on vous a vue notamment dans Les Drapeaux de papier puis il y a eu l’effervescence cannoise avec Le Portrait de la jeune fille en feu. Ça a vraiment été une grosse année pour vous, non?
Noémie Merlant : Vraiment, mais on s’en compte seulement après coup. C’est magique tout ça et mon année a été remplie de films dont je suis très fière.
Le Clap : Le film de Céline Sciamma, bien qu’ayant un univers bien singulier, n’en reste pas moins un film d’époque, un long métrage de costume. En enfiler un, ça aide à mieux cerner le personnage, à mieux l’habiter?
NM : Oui, nécessairement. Mon personnage, celui de la peintre Marianne, a un côté un peu masculin, donc le costume, volontairement, devait être lourd, avec de grandes poches pour bien se distinguer des robes très féminines. Et il y a aussi tout l’aspect qui concerne la gestuelle du peintre qu’il fallait intégrer. Les regards, les respirations et les silences. Tout était dans le scénario tout comme ces non-dits qui sont très importants dans l’amour.
Le Clap : Ça a été facile de développer une complicité avec Adèle Haenel?
NM : On s’est apprivoisées, certes, car on n’avait jamais joué ensemble auparavant. En fait, nous sommes assez différentes dans nos énergies, mais toutes deux, nous prenons notre travail très au sérieux. Alors, on a beaucoup observé l’autre. La réalisatrice nous a aussi laissé une marge de manœuvre afin d’avoir une réelle liberté dans notre jeu, et ce, afin qu’il ait l’air naturel devant la caméra. Nous avons pu nous approprier les dialogues et personnaliser notre jeu face à tout ce qui était écrit à la virgule près dans le scénario. Cette liberté de pouvoir proposer des choses sur un plateau est très importante pour moi.
Le Clap : Le public qui s’intéresse au cinéma et à la peinture se souvient peut-être d’Artemisia sorti en 1997, un film biographique sur une peintre trop peu connue du XVIIe siècle. Votre film sert aussi à démontrer l’importance des femmes peintres qui ont ouvert la voie à une autre époque.
NM : Absolument, la société patriarcale tend à nous faire oublier ces personnages historiques. Marianne représente l’histoire non racontée des femmes.
Le Clap : Un film en costume, avec les décors, l’éclairage, les accessoires, ça alourdit un tournage?
NM : Ah oui, il y a définitivement plus de contraintes avec l’éclairage et les costumes. Mais bon, en même temps, un film d’époque nous permet de voyager dans le temps et une actrice, pour moi du moins, c’est aussi un plaisir très spécial et une fois dans l’action, on oublie tout ça rapidement.
Le Clap : Le succès en France et à l’étranger vous a apporté plus de propositions de scénarios inévitablement, alors si vous pouviez tourner avec un réalisateur en 2020, qui serait-i ?
NM : Sans tricher, mais sachant que vous êtes Québécois, spontanément, je dirais Xavier Dolan. Pour moi, ce serait une fort belle rencontre artistique.
On reverra Noémie Merlant au grand écran en 2020 dans le film Jumbo. À suivre.
Cette entrevue a été réalisée sur invitation, dans le cadre de la 22e édition des Rendez-vous du cinéma d’UniFrance 2020, à Paris.