La vie en banlieue

viedomestiqueQuand on pense au cinéma français des dernières années, plusieurs titres nous viennent en tête. Que ce soit La Haine de Mathieu Kassovitz ou Un monde sans pitié d’Éric Rochant, ces films sont à la fois urbains et parisiens, voire marseillais pour les films de Robert Guédiguian. Ou encore, ce sont des œuvres campagnardes comme Le Bonheur est dans le pré ou provinciales situées chez les Ch’tis ou en Provence. Avec le nouveau long métrage d’Isabelle Czajka, La Vie domestique (en salle dès le 18 juillet), on change complètement de registre et on se retrouve en banlieue française, dans un décor américanisé, presque surréaliste pour des cinéphiles habitués aux décors naturels des films de Rohmer ou de François Ozon et ceux aux ambiances plus nocturnes et citadines de Léos Carax et de Gaspard Noé.

Dans La Vie domestique, on est ailleurs, vraiment! Emmanuelle Devos interprète Juliette, l’un de ses plus beaux emmanuelledevosrôles au cinéma, et Dieu sait qu’elle les accumule depuis quelques années. Mère de famille, Juliette vient du milieu littéraire et se retrouve entre deux emplois à déménager en banlieue où son conjoint vient de se trouver un travail comme proviseur dans une école. Ses journées dans son nouvel environnement seront marquées par des conversations banales avec ses voisines, toutes femmes au foyer, alternant les promenades au parc et celles au centre commercial du quartier. Baignant dans l’American way of life  où les rôles familiaux sont déterminés et caricaturés, Juliette sombre peu à peu, et ce, à l’intérieur d’une seule et même journée, dans une révolte dépressive irréversible.

Le film, adaptation d’un roman paru en 2006 (Arlington Park) de Rachel Cusk (écrivaine britannique née à Saskatoon), se concentre sur la manière de vivre en banlieue parisienne et surtout sur la nature des relations hommes-femmes encastrées dans un milieu bourgeois, parfois réactionnaire et misogyne, où tout semble programmé au quart de tour. L’intérêt réel pour ce long métrage atypique émane évidemment du contexte français de ce récit acidulé aux couleurs trompeuses d’un épisode de Desperate Housewives.

Le film, lancé ici en pleine saison estivale, pourrait hélas passer inaperçu. Dommage, car cette œuvre forte, à l’humour grinçant et au constat douloureux, se veut une réflexion appropriée sur un mode de vie aseptisé qui camoufle souvent un mal-être associé à bien des symptômes qu’on pensait, à tort, exclusif à la manière de vivre des Nord-Américains.

Voici la bande annonce du film La Vie domestique ainsi que l’adresse Internet pour visionner l’entrevue réalisée pour le Clap avec la réalisatrice Isabelle Czajka.

http://www.clap.qc.ca/entrevues